Rémi CARDON

Sénateur de la Somme

Budget 2024 : peu d’avancées pour les collectivités  

Le projet de loi de finances pour 2024 a été promulgué au début du mois de janvier, après le contrôle du Conseil constitutionnel.  

Avec les collègues de mon groupe, nous avons tenu à remplir notre rôle de vigie pour nous faire l’échos de nos territoires et de nos populations tout au long de l’examen de ce texte.  

Vous le savez néanmoins, la tendance du Gouvernement à outrepasser le Parlement par un usage intensif du 49.3 pour les textes budgétaires complique chaque année notre travail et dégrade nos conditions d’examens.  

J’en tiens pour preuve que le nombre d’articles a quadruplé après l’engagement d’un énième 49.3 à l’Assemblée Nationale, du fait de la volonté du Gouvernement d’incorporer des dispositions émanant des bancs de sa majorité, sans étude d’impact ou analyse poussée. L’exemple le plus médiatisé a sans conteste été la création d’une « niche Fifa », scandaleuse car à la fois injuste et inéquitable, qui a sans surprise été censurée par le Conseil constitutionnel avec d’autres dispositions n’ayant aucun lien avec une loi de finances.  

Fidèles à notre engagement de défendre les collectivités, nous nous sommes battus tout au long de cet examen pour défendre un financement juste et pérenne des collectivités territoriales. Alors que la majorité sénatoriale s’exprime souvent sur le sujet, elle a aidé le Gouvernement a rejeté nos demandes d’indexation de la DGF sur l’inflation. Nous avons cependant obtenu quelques victoires, en matière de dotation élu local par exemple ou encore de financement des temps d’activités périscolaires, qui furent par la suite effacées d’un trait de plume par le gouvernement en deuxième lecture.  

Nous avons pourtant porté de nombreuses pistes de réformes fiscales : accroissement de la progressivité de l’impôt sur le revenu pour davantage d’équilibre, mise en place d’un barème plus adapté pour les droits de mutation à titre gratuit et simplification de la fiscalité immobilière, remise en cause des niches fiscales les plus injuste socialement et les plus polluantes, réforme de l’imposition des entreprises pour alléger la pression fiscale sur nos petites et moyennes entreprises qui paient aujourd’hui trop souvent à la place des grandes, alignement de la fiscalité du capital sur la fiscalité du travail ou encore adaptation de la fiscalité aux superprofits se développant, rien n’y a fait : le gouvernement, avec le soutien sans faille de la droite sénatoriale, y a fait obstacle dans une volonté affichée de préserver les plus aisés et les grandes entreprises. 

Nous avons également pesé fortement lors du débat sur les zonages ruraux. Si nous n’avons pas été pleinement entendus, nos amendements ont permis de faire entrer dans le nouveau dispositif France Ruralités Revitalisations davantage de communes et de territoires, tant métropolitaines qu’ultramarines, que ce que prévoyait le gouvernement.  

En matière de logement, nous avons obtenu une belle victoire en obtenant la restriction de la « niche AirBnb » qui conduit à ces situations dramatiques dans de nombreux territoires de notre pays. Cette victoire, si elle ne règle pas tout, sera une avancée notable, obtenu à la suite d’une erreur du gouvernement qui atteste si besoin s’en faut de sa légèreté.  

Nous avons voulu porter sur le volet dépenses plusieurs combats. Je pense en particulier au logement, politique publique particulièrement sinistrée depuis 2017. Notre position est claire : il nous faut relancer la production de logements dans notre pays, et en particulier de logements sociaux, tant les besoins sont grands à l’échelle de nos territoires.  

Nous avons accompagné les renforcements des services publics et de leurs moyens proposés par le Gouvernement dans les secteurs régaliens, tout en demandant à ce que des besoins adéquats soient octroyés, ce qui n’est pas le cas dans ce budget, à l’ensemble de nos services publics et en particulier à ceux permettant de renforcer les solidarités sociales et territoriales dans notre pays.  

Si l’exécutif a fait le choix de maintenir une trajectoire budgétaire largement en deçà des besoins, la loi de finances pour 2024 apporte quelques nouveautés pour les collectivités territoriales.  

Comme je l’évoquais, la DGF ne sera toujours pas indexée sur l’inflation. Elle sera néanmoins revalorisée de 320 millions d’euros et des travaux seront enfin engagés pour une future refonte de la DGF. La dotation sera également revalorisée pour les communes nouvelles qui verront un relèvement à hauteur de 15 euros par habitant de la dotation d’amorçage et une pérennisation de la garantie de non-baisse.  

En outre, le fonds de soutien au développement des activités périscolaires sera maintenu jusqu’au 1er septembre 2025 et la dotation de soutien aux aménités rurales sera portée à 100 millions d’euros. La TVA acquitté sur les dépenses d’aménagement de terrains réalisées à compter du 1er janvier 2024 sera par ailleurs compensée par le FCTVA  

On note également plusieurs changements concernant la TFPB. La perte significative du produit de TFPB sera ainsi en partie compensée en cas de fermeture d’entreprises, alors que l’exonération longue durée de TFPB pour les logements les plus anciens réhabilités sera partiellement compensée. Les exonérations de TFPB pour les propriétaires ayant réalisé d‘importants travaux de rénovation énergétique ne sont désormais plus de droit et doivent faire l’objet d’une délibération pour leur instauration. Enfin, le taux de la taxe d’habitation sur les résidences secondaires peut être augmenté sous certaines conditions sans toucher au taux de la TFPB.  

Ces quelques avancées ne peuvent néanmoins pas masquer le contexte dans lequel s’inscrit cette nouvelle loi de finances pour 2024. Le Gouvernement aurait pu faire le choix d’envoyer un signe clair de soutien aux communes en indexant enfin la DGF sur l’inflation, en prévoyant des volets de financements incitatifs pour les enjeux du ZAN ou encore de la construction de logement. Il n’en sera malheureusement rien avec un budget en recul à euros constant, et alors même que les inégalités territoriales se creusent et que les services publics continuent de souffrir. C’est une nouvelle marque de mépris pour un Gouvernement qui agit décidément sans cap et sans méthode, au mépris de la qualité et de la lisibilité de la loi. 

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