Crées en 1995 les Zones de Revitalisation Rurale ont une nouvelle fois été prolongées à l’occasion du dernier projet de loi de finance mais doivent être réformées pour mieux aider les territoires ruraux menacés.
C’est via un amendement parlementaire au projet de loi de finances pour 2022 que le gouvernement a prorogé plusieurs zonages de soutien à l’attractivité et au développement économique des territoires ruraux ou en difficulté, dont les zones de revitalisation rurale (ZRR), et ce jusqu’au 31 décembre 2023.
Pourtant depuis la très discutable réforme de 2015, de nombreux rapports avaient proposé des réformes plus ou moins radicales :
- Une mission flash de l’Assemblée nationale en 2018;
- Une mission d’information du Sénat en 2019;
- Une mission inter-inspections sur les zonages d’aménagement du territoire en 2020;
- Une mission sur le Rebond Economique des territoires en 2021.
Le gouvernement n’a pas su ou n’a pas pu entamer cette réforme à temps et a prorogé la situation actuelle pour 2 ans de plus, en demandant une Nième rapport sur ce thème en janvier 2022. Le Premier Ministre a donc confié une mission d’information aux sénateurs Bernard Delcros (Cantal), Frédérique Espagnac (Pyrénées-Atlantiques) et aux député(e)s Anne Blanc (Aveyron) et Jean-Noël Barrot (Yvelines).
Après seulement 3 mois de travail, le rapport de la « mission ZRR » a été remis au premier ministre le 11 avril 2022 dernier. Vous pouvez consulter le rapport ICI.
Ils y formulent 14 recommandations, qui selon eux font l’objet « d’un très large consensus des acteurs auditionnés » et il est vrai que bon nombre d’entre elles semblent peu discutables tant leur nécessité et leur bon sens semblent évidents, à deux exemptions près.
Les 14 recommandations du rapport sont :
Recommandation n°1. Maintenir un dispositif global et puissant de soutien en faveur des territoires ruraux, sous la dénomination de « ZRR ». Ce zonage comprendrait d’une part, dès 2024, une série de mesures dédiées aux communes classées ZRR et d’autre part, constituerait un référentiel sur lequel adosser les politiques publiques à venir.
Recommandation n°2. Conserver un classement national indépendant des contrats locaux passés avec l’Etat.
Recommandation n°3. Appliquer les critères de classement à l’échelle communale.
Recommandation n°4. Retenir pour le classement des communes en ZRR, les critères de densité de population et de revenu par habitant. Ce zonage serait révisé tous les 10 ans afin de tenir compte de l’évolution démographique et du revenu par habitant (selon les critères de l’INSEE).
Recommandation n°5. Classer en ZRR l’ensemble des communes des départements de moins de 200 000 habitants dont la population a diminué au cours des 10 dernières années.
Recommandation n°6. Maintenir l’exonération d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés, totale les 5 premières années de l’installation puis dégressive sur les 3 années suivantes en faveur des entreprises de moins de 11 salariés et des professions libérales et élargir le dispositif aux auto-entrepreneurs.
Recommandation n°7. Améliorer la promotion du dispositif ZRR en amont auprès des entreprises, des professionnels de santé, des étudiants et des collectivités locales.
Recommandation n°8. Maintenir a minima l’ensemble des dispositifs de soutien aux communes adossé au classement ZRR dans l’attente de la mise en place d’une évaluation de ces dispositifs et d’une éventuelle adaptation.
Recommandation n°9. Bonifier de 30% la part DSR (dotation de solidarité rurale) de la DGF (dotation globale de fonctionnement) pour toutes les communes ZRR bénéficiaires d’au moins une fraction de la DSR.
Recommandation n°10. Bonifier de 10 points les subventions DETR (Dotation d’équipement des territoires ruraux) attribuées aux communes classées ZRR, financé par une augmentation de l’enveloppe DETR départementale, au prorata du nombre d’habitants des communes classées ZRR.
Recommandation n°11. Mettre en place pour les structures de service à domicile, une exonération totale des charges sociales patronales jusqu’à deux fois le SMIC pour renforcer l’attractivité des métiers d’aide à domicile, qui assurent une véritable mission de service public, indispensable au maintien à domicile des personnes fragiles. Cette mesure s’inscrirait dans la démarche de revalorisation salariale, en complément des mesures conventionnelles et dans un secteur où les rémunérations sont notoirement faibles, à la fois du fait de leur niveau horaire et du grand nombre d’emplois à temps partiel.
Recommandation n°12. Réduire, pour les structures de service à domicile, les surcoûts des frais de déplacement inhérents à l’éloignement et à la faible densité de population par la détaxation du carburant et/ou la mise à disposition sous forme de location d’un parc de véhicules électriques pour les associations et structures employeurs.
Recommandation n°13. Définir deux niveaux de ZRR :
- ZRR de «premier niveau» bénéficiant de l’ensemble du dispositif (exonérations fiscales, aides directes aux communes et soutien aux structures d’aide à domicile).
- ZRR « + » bénéficiant de mesures complémentaires, comme par exemple le soutien à l’investissement des petites entreprises en création ou déjà installées, aux commerces alimentaires ambulants…
Recommandation n°14. Appliquer des règles différenciées dans les communes classées ZRR pour adapter le droit à construire, les normes et les critères d’installation des professions réglementées aux réalités des territoires à faible densité de population et à faible fréquentation.
Les recommandations 11 et 14 voulant, d’une part exonérer les employeurs de cotisation patronales pour caresser l’espoir que ces derniers augmentent les salaires, et d’autres part, en caricaturant à peine, créer des zones de non-droit dans nos campagnes, sont surement à revoir et à rediscuter. Ceci dit, il faut convenir que la simple lecture du rapport ne permet pas forcément de restituer et comprendre les arguments qui ont pu être mis en avant et les limites des propositions énoncées, il convient de rester calme mais vigilent.
Il est en tout cas à espérer que ce sujet soit le plus vite possible pris en main par le gouvernement ou le parlement afin d’apporter aux zones rurales les aides dont elles ont besoin. Cela sera aussi j’espère l’occasion de rediscuter du déséquilibre, pour ne pas dire des inégalités, entre les collectivités rurales et urbaines dans l’octroi des dotations générales de fonctionnement.
Affaire à suivre donc…